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journal de l'après fausse couche
Une femme se sent mère dès qu'elle apprend sa grossesse. Embryon, foetus ou bébé, ça n'a pas d'importance. C'est son enfant. Enfin, c'était déjà.
Alors la fausse couche, pour quelqu'un d'aussi sensible que moi, c'est une épreuve dont on ne se remet pas juste en claquant des doigts, comme les gens le voudraient bien, à commencer par moi-même.Il le faudrait pourtant, je ne suis pas agréable à vivre en ce moment. Ni pour mon fils, ni pour mon mari, ni pour le peu d'amis que j'ai. Ni même pour moi-même. Je me déteste.
Muriel Flis Trêves, psychiatre psychanalyste, dit dans cet article:
[...]De manière générale, notre société ne supporte plus le malheur, on ne veut pas l'entendre.
Aussi met-on immédiatement des mots sur la souffrance: "ça va s'arranger, tu verras avec le temps..."
Autant de phrases qui musèlent et enferment la femme endeuillée dans sa souffrance. Le silence est souvent sa seule défense, c'est aussi une prison puisque son chagrin est nié.
Le deuil ne peut pas se faire. Lorsqu'il s'agit de la mort d'un fœtus, celui-ci, plus qu'un passé de vie commune, représente tout un avenir anéanti. Le deuil est compliqué surtout parce qu'il faudra renoncer au fœtus avant même de l'avoir connu. Il serait possible pourtant de laisser la femme endeuillée s'exprimer, sans colmater notre malaise par ces mots creux. Elle a sans doute besoin d'en parler mais elle ne va pas forcément s'apitoyer sur elle-même. Il ne s'agit pas de valoriser la douleur, de faire de ces femmes des victimes, mais seulement de les laisser avoir leur chagrin.
Et quel conseil donner à leurs conjoints ? De parler s'ils ont besoin. Certains hommes ne se permettent pas de souffrir, ils veulent rester dans leur rôle de pilier. En fait, ils sont souvent très démunis face à leur femme qui est dans la culpabilité et la honte. Quant aux enfants, s'ils étaient au courant de la grossesse, il faut là encore sortir du silence et du secret.[...]
[...]C'est non pas le deuil d'un passé que l'on est appelé à faire mais bien le deuil de tout un avenir.[...]
[...]Et puis, cette mort qui intervient au sein même de leur propre corps, c'est un peu la leur, certaines femmes la vivent vraiment comme une mutilation.[...]
Punaise je suis de celles-là!
Voilà où j'en suis. J'ai ouvert ce blog aussi un peu pour ça. En parler. Avoir la sensation d'être écoutée, entendue, soutenue?
Il y a tant de fois où j'ai envie de crier, hurler, extérioriser fort mon existence et mon envie de vivre et parfois je rêve de tout le contraire, j'ai envie de silence absolu, de calme, de solitude.En ce moment, je me sens épuisée, fatiguée, je souffre d'insomnie, je n'ai plus d'appétit ou alors je vais me mettre à manger n'importe quoi n'importe comment (razzia de chips ).
J'ai le sentiment d'être en colère tout le temps et contre tout le monde. Alors que personne n'a rien fait, personne ne mérite ma colère.
J'ai honte parce que j'ai horreur qu'on me parle des grossesses des autres, je deviens quelqu'un que je déteste, je suis incapable de regarder une femme enceinte sans chialer, mais comme j'ai honte, je me contiens et je me cache.
J'ai honte de ne pas me réjouir du bonheur des grossesses des autres. Enfin, si, je suis sûre que quelque part à l'intérieur, je ressens de la joie pour ces filles, mais j'ai pas envie d'écouter cette joie puisque personne n'écoute ma peine.
Qu'est ce que cette fausse couche a déclenché en moi?J'ai horreur des changements, de ce qui n'est pas prévu, je ne supporte pas que les choses ne tournent pas comme je les avais programmées. C'est carrément pathologique chez moi. Je deviens dingue.
Et comme une idiote, depuis longtemps, j'avais programmé que je serais mère de 2 enfants (les seuls que je veux car je ne veux pas de 3è) à 30 ans. Et mes 30 ans, c'est dans 6 semaines exactement. Alors c'est foutu. Même si je tombais enceinte demain, cet enfant naîtrait en 2012, année de mes 31 ans.
Pour moi, ma situation de vie idéale pour mes 30 ans (ben oui, 30 ans, c'est un cap débile mais c'est un cap quand même), c'était d'être heureuse avec l'homme que j'aime, qu'il m'aime aussi, nous aurions 2 beaux enfants, j'aurais un boulot tranquille et nous serions sur le point de devenir propriétaires de notre premier logement. J'en demandais pas beaucoup. J'ai jamais rêvé d'être une star ou de vivre une vie de riche.
J'étais si proche du but! Pour moi, c'était ça, réussir.
Alors j'ai l'impression d'avoir échoué. Je me sens minable. C'est minable de se sentir minable pour ça. Je le sais.
Et je me dis que toutes ces années, tous ces gens qui n'ont pas cru en moi, qui ne voyaient en moi qu'une minable, ils ont bien raison.
Alors méchamment, j'espère qu'ils sont moins heureux que moi, pourquoi ça me soulagerait, j'en sais rien. Et puis non en plus, ça ne me soulagerait sûrement en rien. Parce que je m'en fous pas mal de ce qu'ils ont pu penser de moi à cette époque-là où je voulais tant être intégrée. On n'y est plus à cette époque-là. Je devrais me soucier de notre époque actuelle. Mais surtout arrêter de me soucier de savoir ce que les gens pensent de moi.
Pourquoi je voudrais tellement que tout le monde m'aime?
Et pourtant, pourquoi je fuis tellement les gens? Pourquoi je m'ennuie? Pourquoi je n'ai que peu d'amis et pourquoi j'ai envie à la fois d'en avoir plus et mais qu'on me foute la paix?
Et si finalement, je n'étais qu'une asociale? Et si je n'étais tout simplement qu'une personne inapte à la vie en société? Dans CETTE société?